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Pépinière Lafeuillée

55 Chemin De La Feuillée, St-Charles-Borromée, Joliette, Québec J6E 7Y8 Tél. 450-759-5458




Cueillir des noix au Québec

Lorsque l'on s'intéresse aux arbres, surtout ceux considérés nobles, que se soit ceux indigènes ou ceux introduits, on arrive à considérer les noyers, caryers et chênes comme les plus précieux principalement à cause de la valeur de leur bois. En rapport avec ses essences, l'idée de cueillir des noix et glands fait partie de notre culture du passé que plusieurs de nos parents et grands parents pratiquaient, coutume plus ancienne encore transmise par les colons qui les tenaient des autochtones ou des européens. Bien que marginal comme support alimentaire, noix et noisettes ont toujours été utilisé dans des recettes culinaires. Leur grand avantage est qu'ils se conservent longtemps si on les compare aux autres fruits frais.



Un randonneur-cueilleur qui explore les sites naturels riches en flore comestible et les parcs publiques où de grands arbres sont accessibles, nous fait le portrait de ce que serait une fructueuse cueillette de noix à l’automne. Ceci coïncide avec la saison des pommes, raisins et champignons comestibles.



Le début des cueillettes

Très souvent sous forme de randonnées récréatives, par observation, on se rend compte d'une présente richesse végétale toujours existante sur notre territoire. Cependant bien que les boisés et parcs sont fréquents, il ne faut pas croire à une abondance évidente d'arbres à noix et sans avoir déjà localisé des lieux propices antérieurement, le cueilleur aventureux reviendra bredouille la plus part du temps.



C’est vers la mi-août et jusqu’au début septembre que les noisettes du coudrier (Corylus cornuta) sont récoltées sur l’arbuste. Elles sont mûres bien avant qu’elles tombent d’elles-mêmes . À cause de la plus forte compétition arboricole et arbustive dans le sud et centre du Québec et des sols souvent trop argileux pour le noisetier, l’espèce est plus abondant en montagne et particulièrement dans les régions de la Gaspésie et le Lac St-Jean où de bonnes populations ont été signalées. Là-bas, le déboisement a permis aux noisetiers, s’ils sont dispersés et semés par les écureuils, de proliférer profitant de la ‘disponibilité’ des lieux libres et ensoleillés. Plus au sud, malgré l’abondance des noisettes certaines années, Gaies bleus et charançons du noisetier (Curculio obtusus) réduisent grandement la qualité des récoltes.



Le rare noisetier américain (Corylus americana) une espèce voisine, pourrait se trouver encore à l’extrême sud-ouest près des frontières ontarienne ou américaine. Son fruit est nettement différent mais de grosseur semblable qui se récolte cependant vers la mi-septembre. Il s'y distingue aussi du premier par un colorie automnal rougeâtre. Si on veux être certain de trouver des individus, il faut se rendre sur l'Île Cornwall en Ontario, la réserve Akwesasne.



Notre randonneur-cueilleur commence sa route cependant du centre du Québec en sillonnant le Chemin Du Roi de la vallée du St-Laurent et doit attendre quelques semaines avant de ramasser au sol les précieuses ‘noix longues’ des noyers tendres ou cendrés (Juglans cinerea) qu'ils rencontre près des fermes ou dans les villages, particulièrement à Champlain. Entre-temps, il garde les noisettes ramassées au Bas de Fleuve dans un sacs avec beaucoup d’humidité pour permette de ramollir les involucres piquantes qui se détacheront mieux des noisettes par la suite. Le noyer cendré semble en régression au Québec* mais demeure l’espèce la plus importante pour l’usage de sa noix à la consommation. Curieusement on trouve à l'occasion de grands noyers dans les petites villes ou villages où ils bénéficient d'une meilleur protection contre les coupes de bois. C’est vers la mi-septembre que ses noix sont disponibles parfois plus tôt quant les écureuils les jettent prématurément. La chair de la noix a un goût huileux et doux, surpassant celle du noyer royale ou de Grenoble (Juglans regia), et contient près de 20 % de protéine. Le noyer tendre se retrouve encore dans plusieurs régions mais jamais en forte colonie mais plutôt dispersé et croît où il y a assez de luminosité, indispensable à son déploiement. La noix allongée est facilement identifiable car elle est couverte par un brou collant. Les grappes sont de 2 à 4 la plupart du temps. À une certaine distance, en fin septembre, ces noyers sont plus facilement identifiables perdant déjà leurs feuilles jaunies. Les noix ne tombent pas tous en même temps et notre randonneur doit revenir à intervalle et batte de vitesse les écureuils en présence car il est rare de trouver des noix longues au sol en octobre.



*Déboisement, maladies fongiques et faible reboisement.



Toujours en fin septembre, la route se poursuit dans la grande région de Montréal où il y a moins de noyer cendré à cause de l’urbanisation évidente. Toutefois, en ratissant bien les bords d’îlots d’érablières, les lieux accidentés où les sols sont riches, l’explorateur de plus en plus amateur de noix, réussit à trouver des noix de caryer. La région la plus chaude du Québec du point de vue unités thermiques mais aussi des sols riches et pas trop acides des basses altitudes, est l’aboutissement de l’aire nordique de deux essences nucifères précieuses, les caryers à noix douces et à noix amères (Carya ovata, C. cordiformis). les caryers ovale et amer sont à l’extrême nord de leurs aires naturels au sud du Québec et sont maintenant recherchés pour le reboisement noble.



Les caryers ont des similitudes avec les noyers; ils sont monoïques , les fleurs mâles forme de long chatons en expansion en fin mai-début juin. En grappe de 2, les noix lisses ont des cavités profondes qui libèrent difficilement l’amande entière. Les caryers sont par contre tolérants à l’ombre et tentent à former des peuplements . Le Caryer ovale produit des noix très douces rappelant celle de la pacane (Carya illinoensis) indigènes aux sud-est et centre des États-Unis. Décourageante à extraire l’amande enfouit dans une coquille dure et petite, le cueilleur-amateur décide plutôt de les garder fraîches pour les semer. Les noix du caryer ovale ont une valeur grandissante depuis les dernières années répondant à une demande croissante de l’espèce pour la multiplication d’arbres précieux indigènes. Sans devoir être un expert en identification d’arbre, notre randonneur à identifié avec facilité le caryer à noix douces car même à distance, les arbres adultes ont un tronc couvert d’une écorce d’apparence négligée qui se détache en lambeaux. Quelques rares individus près de Répentigny , plusieurs à Pointe-aux-Trembles, et plus encore à Pointe du Buisson. Par contre le caryer amer bien que plus abondant en général et du même habitat, demande plus d’expertises à l'identification à distance. Ses noix sont très amères et inutilisables à la consommation mais très valables au reboisement noble.



Jadis, de grands caryer amers de plus de 30 m colonisaient une érablière tout près de Joliette, pour cette taille, ces arbres peuvent avoir eu 200 ans ! Non loin de là, le village de Crabtree possède de bonnes populations de ces caryers et constituer sûrement la limite nord de l’érablière à caryers au Québec. Devant cette abondance de noix, bien qu’amères, notre amis décide d’en ramasser histoire de profiter de l’instant. Il se dit que sûrement il en sèmera et en donnera à d’autres amateurs. Nous sommes au début octobre et l’excursion se poursuit de plus belle vers le sud car déjà les nuits sont froides et les gels au sols peuvent endommager certaines semences comme les glands de chênes à glands doux qui se récoltent à la même période. Les glands du chêne à gros fruits (Quercus macrocarpa) n'ont pas trop d'acide tannique lorsque bien mûr et sont parfois abondant. Ce chêne partage sensiblement le même type d'habitat que les caryers.



Depuis la fin septembre, notre randonneur à visité quelques régions surtout forestières et à donné peu d’intérêt aux petites faines des grands hêtres (Fagus grandifolia) pourtant souvent produites en abondance. Le hêtre est plus abondant en forêt, il produit également une petite amande douce parfois en grande abondance vers la fin septembre. C’est l’espèce la plus négligée de ce domaine en ce qui concerne l’intérêt pour un usage de ses fruits pourtant doux, huileux et contenant 19 % de protéine ! La petitesse de la semence reste son principal défaut, il faut que les arbres en produisent en masse pour faire des récoltes intéressantes. Note: l'espèce semble auto-stérile lorsque isolée (semence vide à l'intérieur).



Quelques espèces introduites présentes au Québec

Revenant dans la région de Montréal, notre explorateur ramasse tout ce qui ressemble à des noix. Relativement fréquent sur la grande Île et sa région, devant les résidences et bords de rues , des marronniers produisent assez abondamment en cette période de fin septembre. Les marronniers d’Inde (Aesculus hippocastanum) et de l’Ohio (A. glagra) sont des espèces ornementales pour leurs floraisons spectaculaires au début juin mais leurs fruits ne sont pas recommandés à la consommation. Malgré 40% d’amidon et peu de gras, la teneur en acide tannique peut causer des intoxications parfois graves lorsque consommé en grande quantité. Toutefois la cuisson améliore leur comestibilité sans pour autant en faire une noix délectable lorsque cuite, comme la châtaigne du châtaignier (Castanea). L’ami-randonneur décide d’en ramasser un peu pour des élèves d’une école qui, gardé jusqu’au printemps au frigo, seront stratifiés et serviront à leurs expérimentations de germinations de semences d’arbres. Je recommande de les faire sécher quelque peu avant l'entreposage au frais sinon elles germent hâtivement.



La route des noix’ se poursuit de plus bel vers le sud dans la région de Oka où quelques noyers noirs (Juglans nigra) ont été identifiés par l’ami. le noyer noir se fait de plus en plus fréquent. Ce grand arbre précieux mis en valeur par les anglo-saxon, nous vient surtout du Sud de l’Ontario et de l’Est des États-Unis. Ses grosses noix rondes tombent au début octobre. Les brous épais ont jaunis ce qui révèle un bon indice de l’état de mûrissement de l’amande. Le randonneur-averti utilise de bons gants de caoutchouc et des bottes qu’il se sert pour enlever sur place, en les frottant au sol, les brous qui s’y détachent. Le volume est réduit de moitié de cette façon. Il remarque de petits vers blancs qui envahissent les brous. C'est indésirables ne cause toutefois pas de dommage aux amandes.



Par curiosité mais aussi par recommandation, il casse quelques noix pour examiner la qualité de l’amande qui doit être blanche et bien formée. Lorsque ainsi fraîche, elles ont peu de goût bien que plus digestives mais une fois séchées, leur goût deviendra épicé et unique au noyer noir. Voilà pourquoi nos voisin du sud en font un bon usage dans diverses recettes de crème glacée et confiseries. Sans mesurer le temps, la distance et la fatigue, la route des noix l’amène jusqu’à Prescot dans l’est de l’Ontario après avoir sillonné la vielle route. Dans cette petite ville, il y a beaucoup plus de grands noyers noirs qui ont été plantés auprès des résidences. Ils semblent produire encore mieux bien que peu de gens en ramassent, très probablement à cause des brous qui contiennent le juglon qui tache et de la dureté des noix à les ouvrir.



D’autres noyers : Plus rare encore dans l’environnement que le noyer noir qui monte en popularité, quelques autres espèces de noyers rustiques peuvent être identifiées à tort comme noyer cendré à cause de certaines ressemblances. Le noyer de Mandchourie (J. manshurica) et le noyer hybride (J. cinerea x J.ailantifolia) ont été observés ici et là , isolés comme arbres ornementaux. Leur noix sont le plus souvent dures et allongées comme le noyer cendré bien que le noyer hybride montre des variances de forme de noix dans un brou plus épais, non collant qui se détache mieux selon la rugosité de la noix. Tandis que le noyer de Mandchourie possède une noix beaucoup moins rugueuse. Un autre, le noyer des Carpates (Juglans regia var.Carpathian), provient des noix rapportées d'Europe depuis 1932 à Toronto par le révérant Paul C. Crath, à été planté d’une façon sporadique et peut se trouver encore sur notre territoire. C’est une espèce de noyer de Grenoble qui à une certaine difficulté à atteindre une taille respectable dû au froid hivernal qui lui cause de sévères gelures. Lorsque l’arbre est sain, il arrive à produire des noix viables.



Motivé et grâce à un casse-noix robuste conçu pour les noix dures, le randonneur-cueilleur à ramassé un grande quantité de noix de noyer noir dans le but de les consommer. IL remarque que les noix d'un arbre à l'autre diffèrent de grosseur. Bien nettoyées en premier, puis séchées dans un endroit chaud et sec pendant un mois, les noix seront dégustées pour les fêtes. Il en garde un peu, comme semences fraîches et pense à quelques amis qui ont de grands espaces adéquats pour l’espèce. Les noix des noyers cendrés seront séchées de la même façon mais avec leurs brous qui s’enlèveront en s’effritant une fois secs avant le cassage.

 

Des tonnes de noix

Bien que réputé avec raison pour la culture de la pomme, la région de Rougemont - St-Paul d'Abbotsford possède plusieurs noyers de bonne taille qui produisent abondamment certaines années. Deux immenses spécimens plus que centenaire à St-Paul d'Abbostford (Juglans cinerea x J. ailantifolia) ont produit une quantité phénoménale de noix. Avec le temps, des semis ont émergés naturellement aux alentours. Plusieurs autres noyers de même type localisés à St-Césaire et Rougemont semblent appartenir à la même origine. Un petit verger initier par Laurent Brodeur (à Barbue de St-Césaire) en 1977 à partir des noix régionales ont donné des noyers dont les fruits sont soit gros et rugueux ou soit petits, ronds et lisses. M. Brodeur, bien que décédé en 2004, son frère Jean-Marie continue la cueillette de noix de tous les noyers environnent et amasse en moyenne 10 gros sacs (20 kg) par année, les meilleures années seront le double. Ayant commencé jeune garçon initié par son père, il est maintenant âgé de près de 80 ans, Jean Marie et son frère Laurent à eux seuls ont récolté puis nettoyé et cassé des tonnes de noix par passion de les consommer et de les offrir à leurs proches. Voici le meilleur exemple au Québec d'une réalité tangible et peu connue que 2 hommes ont réalisée en dépit de l'indifférence des gens à leur égard ou la valeur de cette ressource disponible. Bravo ! à plus de 60 ans de récolte de noix.



Faire de bon semis

Dans cette optique, on doit considérer les noix fraîches comme des semences. Toutes les noix citées ici ne demandent aucun traitement particulier mais seulement une période de froid de plusieurs mois que l’on appelle la stratification (ce qui permettra la formation de l’embryon). Comme notre pèlerin rentre chez lui avec beaucoup de noix mais doit s’occuper de d’autres urgences dans l’immédiat, Il garde tous ses sacs identifiés dans une remise à l’écart des variations de chaleur et gel sévère. Il prend bien soin qu’aucun écureuils et tamias entreront non plus. Pour les semis d’automne, les noix des noyers et caryers qu’il décide de semer sont nettoyées quelque peu, pour le plus possible, éviter certaines larves présentes dans les brous de s’établir dans le nouveau milieu. Ces brous n’empêcheront pas toutefois la germination des noix. Les noix seront sur le plat pour permette au germe de sortir aisément sur le côté et à peine à 2-3 cm de profondeur. Un épais paillis de copeaux est cependant ajouté comme protection hivernale et sera étendu au printemps. Finalement un tuteur identifie le lieu et le semis.



Comme la majeure partie des noix pour semer n’ont pas encore une vocation définitive, le jardinier opte pour la méthode suivante:



Pour garder avec assurance les semences contre les basses températures, la sécheresse , les rongeurs et afin de ne pas embarrasser son frigo, chaque variété est enfouit à 30-50 cm de profond dans un endroit sablonneux si possible et drainé, dans des sacs contenant 50% de sable grossier humide pour 50% de noix. Les sacs sont identifiés de l’extérieur. Aussitôt le dégel du printemps, les sacs sont ouverts et aérés et brassés puis gardés encore un mois jusque en mai. Les semis se feront de la même manière qu’à l’automne.